La question de la liberté est une préoccupation majeure de l’humanité et cela depuis son origine. Malgré les époques et les latitudes, cette question apparaît comme une exigence forte, constitutive, du genre humain. Si nous soutenons, avec Aristote, que tous les hommes, naturellement, désirent le savoir, nous devons poursuivre et ajouter que tous les hommes, partout où ils se trouvent, aspirent également, par nature, à être libres. Nul n’ambitionne de vivre esclave ou emprisonné. Parce que la liberté, la quête de la liberté, la jouissance de la liberté, correspond à l’être profond de chaque être humain. Combien de guerres, de luttes, de combats menés au nom de la liberté ? Combien de larmes coulées rien que pour murmurer son nom ou l’entendre prononcer ? Combien d’hommes partis trop tôt pour la défendre ? Si elle est sans aucun doute ce que sont les hommes, la liberté n’est jamais pour autant un acquis. Elle est toujours menacée par des idéologies arriérées qui ne poursuivent comme dessein inavoué que de la faire taire. C’est le cas du fondamentalisme religieux, qu’il soit islamique ou chrétien, ainsi que des régimes politiques totalitaires ou semi-totalitaires. Mais, même dans les sociétés démocratiques, ou dites démocratiques, la liberté doit demeurer vigilante car elle n’est pas ad vitam aeternam à l’abri d’un liberticide. Le PatriotAct signé en 2001 à la suite des attentats du 11 septembre 2001 et les révélations, dès 2013, du lanceur d’alerte Edward Snowden sur les programmes de surveillance de masse (écoutes téléphoniques, écoutes sur internet…) de la National Security Agency (NSA), l’agence de renseignement électromagnétique américaine, constituent, pour les Américains, des exemples concrets de restrictions de leur liberté.

         Ce quatrième numéro de la revue Sophos, numéro thématique, manifeste un intérêt pour cette notion de liberté. Elle est ici, c’est le cas de le dire, librement interrogée, sondée, analysée par des chercheurs d’horizons géographiques et disciplinaires variés : philosophie, littérature, sociologie, sciences juridiques, anthropologie, sciences politiques, esthétique, psychologie… Cette diversité heuristique et éristique, ainsi que géographique, participe non seulement à enrichir le débat, mais également à ouvrir des champs de réflexion pertinents sur la situation de la liberté en Afrique. Ce qui, comme pour les précédents numéros, ancre pleinement ce quatrième numéro de la revue Sophos dans son espace ainsi que dans son temps ; contribuant à mettre en exergue cette dimension qui, pour nous, constitue le véritable défi de la recherche africaine, c’est-à-dire amener les Africains à penser par eux-mêmes. Cela, seuls des esprits libres sont en capacité de le faire comme le signale Hegel dans les Principes de la philosophie du droit : « L’esclave ne connaît pas son essence, ni son infinité, à savoir la liberté, il ne se connaît pas, c’est-à-dire qu’il ne se pense pas » (1999 : 103). Les « sources proprement africaines sont irremplaçables » (1982 : 45) écrira René Luc Moreau dans Africains musulmans : des communautés en mouvement. C’est une assertion à laquelle nous souscrivons totalement et ce quatrième numéro de la revue Sophos, comme les précédentes parutions, participe également de cela. Où en est la question de la liberté en Afrique ? Les contributions thématiques de ce quatrième numéro, dans une diversité disciplinaire, loin de tout  pathos, tentent de répondre à cette interrogation fondamentale de manière objective, sans caricature, en montrant les limites, les avancées et en formulant des propositions originales qui, sans être stipulatives, espèrent, pour le plus grand bien de la recherche africaine, faire poursuivre le débat.

Bonne lecture à toutes, à tous, et bon vent à Sophos !!!

Dr. Symphorien NGUEMA EZEMA